Suivre un fil de soie à travers Valence

    14/03/25 14:29

    Les robes élégantes que des milliers de Valenciennes portent avec fierté, non seulement pendant Las Fallas, mais aussi lors de n’importe quelle fête ou célébration, sont spéciales pour de nombreuses raisons. Il ne s’agit pas seulement de leur symbolisme, qui préserve une tradition séculaire, ou de leurs motifs floraux colorés et vifs. Elles rappellent également l’importance historique de la soie à Valencia. 

    Le commerce de la soie a prospéré à Valencia entre le XVe et le XIXe siècle, plaçant la ville au cœur de l’une des plus importantes routes commerciales et culturelles du monde : la route de la soie entre l’Orient et l’Occident. Aujourd’hui, on retrouve ses traces dans différents quartiers de la ville et dans des traditions telles que les vêtements valenciens. 

    Si les tissus en soie sont toujours privilégiés si le budget le permet, il est désormais courant de trouver des robes en coton ou en rayonne. Et seules les falleras mayores de Valencia, ou celles qui peuvent se permettre d’investir plusieurs milliers d’euros dans une robe, portent du tissu espolín, le joyau ultime de la soie valencienne. 

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    L’espolín, ou tissu espoliné pour être plus précis, est un tissu de soie de la plus haute qualité, réalisé à la main à l’aide de petites aiguilles (les espolines) pour passer les trames qui constitueront les motifs. À Valencia, il ne reste plus que trois artisans tisseurs d'espolín qui continuent à utiliser des méthodes traditionnelles et des métiers à tisser en bois pour créer ces authentiques œuvres d’art : Compañia Valenciana de la Seda, Vives y Marí et Espolines de Garín, entreprise fondée en 1820.  

    Dans le nouveau musée de la fabrique de soie de Moncada, dans les installations de Garín, dans cette commune située au nord de Valencia, vous pourrez voir comment on tissu l'espolín en direct. Le musée expose également des métiers à tisser, des croquis, des échantillons de tissus et de vêtements, et vous pourrez en apprendre davantage sur l’histoire de cette entreprise familiale et sur la tradition de la soie à Valencia. 

    Il existe de nombreuses boutiques spécialisées dans les costumes de Fallas, comme celle d’Amparo Fabra, dans le quartier d’Ensanche, ou celle d’Eduardo Cervera, à Quatre Carreres, deux magasins de référence des costumes valenciens de qualité. Ils ne travaillent pas la soie, mais les orfèvres Peris Roca sont de véritables maîtres de la parure valencienne et dans leur boutique de Bolsería 31, dans le centre historique, vous trouverez des bijoux très originaux. 

    Mais ce n’est pas seulement dans les robes valenciennes que la tradition de l’utilisation de la soie se perpétue. Des créateurs valenciens modernes, tels que Francis Montesinos, ont également souvent recours à ce tissu subtil. Vida y Milagros est une boutique spécialisée dans les kimonos en soie naturelle, alliant style méditerranéen et inspiration orientale. À Ensedarte, l’artisane Eva Escamilla propose de magnifiques foulards et d’autres articles en soie peints à la main, ainsi que des ateliers au cours desquels les participants peuvent peindre leur propre foulard de soie. 

    Il s’agit d’exemples contemporains du commerce de la soie à Valencia. Au Moyen Âge, les transactions commerciales se déroulaient dans la Lonja de la Seda (halle de la soie), un joyau de l’architecture civile gothique inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette visite est une partie essentielle de la Route de la soie de Valencia, un circuit pédestre qui suit l’héritage de ce commerce dans la ville. 

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    L’itinéraire passe par le quartier des velluters (ou quartier El Pilar), où s’installaient les maîtres tisseurs de soie qui tissaient le velours (vellut en valencien, d’où son nom). On estime qu’à son apogée, au XVIIIe siècle, le quartier comptait jusqu’à 5 000 métiers à tisser la soie. La richesse et le prestige de la guilde des velluters sont encore visibles dans l’architecture, avec des exemples tels que le palais Tamarit, un ancien atelier de soierie. 

    L’industrie de la soie de Valencia a décliné au XIXe siècle avec l’automatisation et l’arrivée d’épidémies qui ont affecté l’élevage des vers à soie. Les difficultés économiques ont conduit à la rébellion des ouvriers de la soie, qui se sont mutinés en 1856 pour réclamer de meilleurs salaires. Cet exemple précoce de revendication prolétarienne est commémoré par le feu chaque année, le dernier week-end de janvier, lors de la Foguera del Motí des Velluters sur la Plaza del Pilar.  

    Le siège de la guilde des velluters a été établi dans le Colegio del Arte Mayor de la Seda, un magnifique bâtiment du XVe siècle déclaré monument historique-artistique national. Rénové par la Fondation Hortensia Herrero, il abrite aujourd’hui le Musée de la soie. En plus d'admirer les sols en céramique colorée et les fresques à l’intérieur, de nombreux documents relatifs à la guilde peuvent être consultés dans les archives historiques, ainsi que contempler d’anciens métiers à tisser et outils de travail. Les étoffes en soie exquises et les vêtements anciens ne manquent pas non plus. 

    Ce musée retrace également l’histoire de la production et du commerce de la soie à Valencia, depuis l’introduction du ver à soie et de la culture du mûrier par les Arabes au VIIIe siècle. Dès lors, les vergers périurbains se couvrirent de mûriers et les paysans élevèrent des vers à soie dans des andanas, des structures spéciales faites de roseaux, dans leurs cabanes et leurs fermes traditionnelles.  

    Il ne reste plus guère de vestiges de cette tradition dans les vergers valenciens, mais au musée de la soie, vous pourrez voir l’une de ces andanas et assister à une démonstration en direct de l’extraction du délicat filament de soie des cocons. L’humble début d’un fil avec lequel a été tissée l’époque la plus glorieuse de Valencia.  

     

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